Une consommation excessive d’écran n’est pas sans danger. Et, de plus en plus de Français souhaitent se déconnecter. Des solutions émergent mais semblent faire de la déconnexion un enjeu individuel, accessible à quelques privilégiés au détriment d’un droit qui devrait s’appliquer à tous.
Alors que le temps d’écran moyen ne cesse d’augmenter, se situant à plus de 5 heures par jour en moyenne, un Français sur cinq déclarait dans les bonnes résolutions 2025 vouloir réduire son usage numérique selon Ouest France.
Les effets néfastes des écrans
Les écrans (en particulier les réseaux sociaux) captent de plus en plus notre attention. Tout est mis en œuvre pour nous retenir le plus longtemps possible sur des interfaces toujours plus ergonomiques, esthétiques avec des algorithmes qui fournissent des contenus au plus près de nos aspirations. Mais cette dépendance n’est pas sans risque pour la santé. En effet, parmi les effets néfastes identifiés d’une surexposition aux écrans sont répertoriés une anxiété accrue, des troubles du sommeil aggravés, une perte de concentration voire une augmentation du taux de suicide chez les plus jeunes (qui est la deuxième cause de mortalité chez les moins de 25 ans).
Le marché de la détox digitale
Nombre d’utilisateurs sont conscients de ces effets et cherchent à reprendre le contrôle sur leur consommation numérique. Une nouvelle économie de la déconnexion se fait jour, notamment avec des vidéos très populaires de « digital detox » et autres contenus web sur cette thématique (bien qu’il soit paradoxal de s’approprier des sujets liés à la déconnexion sur des supports numériques…).
Dans le tourisme, des séjours « déconnexion », sans téléphone et centrés sur le bien-être se développent, avec parfois des tarifs assez élevés. À Paris, le concept néerlandais, The Offline Club, organise des évènements sans écrans : lectures, balades, rencontres entre membres, chaque évènement étant tarifé entre 8 et 15 euros. C’est un véritable marché du minimalisme digital qui se structure, certaines personnes étant prêtes à payer pour s’éloigner du numérique.
Du côté des équipements numériques, des appareils idiots (de l’anglais dumb down), téléphones ou tablettes épurés comme le Light Phone, se limitent volontairement à leurs fonctions essentielles.
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Détox digitale : un luxe réservé à des privilégiés
Malheureusement, l’ensemble de ces propositions de déconnexion visent un public privilégié, constitué de cadres, de créatifs, d’indépendants – ceux qui disposent du temps, de la culture et des moyens nécessaires pour « se déconnecter ». L’imaginaire mobilisé valorise la concentration, la productivité et une forme d’épanouissement intellectuel ou spirituel. La démarche est donc individuelle et consiste à se protéger soi-même sans interroger collectivement la place du numérique dans la société. Pour certains chercheurs, le « droit à la déconnexion » tend à devenir un produit de consommation, un luxe réservé à ceux qui peuvent se l’offrir.
Or, aujourd’hui, la quasi-totalité des démarches sont dématérialisées et nécessitent de posséder et d’utiliser un smartphone. Les solutions proposées pour décrocher reposent sur la responsabilité individuelle et les moyens de chacun.
Ouvrir un vrai droit à la déconnexion pour tous
Pourtant, des initiatives ont vu le jour pour apporter une réponse collective et politique à ces questions, telles que le rapport gouvernemental paru en avril 2024 Enfants et écrans : À la recherche du temps perdu, ou encore les actions de l’association Lève les yeux !, qui milite pour la reconquête de l’attention.
L’objectif est de faire de la déconnexion un droit collectif – au croisement de la santé publique, de l’éducation et de la démocratie – et non un luxe réservé à quelques-uns.
