Pour la deuxième fois, le Conseil d’État annule le décret encadrant la vente de certains fruits et légumes dans des emballages en plastique, provoquant incompréhension et colère de la part des consommateurs mais aussi des producteurs.
Un vice substantiel de procédure
Mesure phare de la loi Agec (Anti-gaspillage pour une économie circulaire), le décret du 20 juin 2023 interdisait à compter du 1er juillet 2023 la vente au détail de fruits et légumes frais dans un emballage plastique, à l’exception de certaines denrées, à savoir les graines germées, les fruits mûrs à point, une liste de 29 fruits et légumes présentant un risque de détérioration lors de leur vente en vrac (endives, asperges, brocolis, framboises, fraises, myrtilles…), ainsi que les fruits et légumes conditionnés par lots de 1,5 kg ou plus.
Or, dans une décision rendue le 8 novembre 2024, le Conseil d’État a annulé cette interdiction en raison d’un « vice substantiel » de procédure. Cette mesure ne serait pas en conformité avec le droit de l’Union européenne sur les restrictions concernant les emballages à usage unique (projet de règlement en cours d’élaboration, supposé entrer en vigueur à l’horizon 2030).
Le texte avait déjà été retoqué une première fois le 9 décembre 2022, le Conseil d’État ayant jugé illégaux le calendrier progressif et le nombre de dérogations accordées.
Lobby des syndicats du plastique
À l’origine de cette décision, un recours introduit par deux syndicats auprès de la Haute Juridiction : Elipso, l’association représentant les fabricants d’emballages en plastique, et Plastalliance, l’association professionnelle des plasturgistes.
A lire aussi : Film alimentaire : quelles alternatives ?
La décision est mal perçue, tant par le grand public que par les professionnels et les associations environnementales. Alors que l’impact de la pollution plastique n’a jamais été autant documenté (en raison des dommages environnementaux mais aussi sanitaires), les consommateurs ne comprennent pas ce recul.
Côté producteurs, nombre d’entre eux ont investi massivement pour remplacer leurs machines et proposer des alternatives aux emballages plastiques, parfois moins pratiques et plus coûteux. Certains déclarant envisager de revenir en arrière !
Pour Manon Richert, responsable de la communication de l’association environnementale Zero Waste France : « Cette décision est un très mauvais signal, qui consiste à dire aux producteurs de plastique « continuez à produire comme vous faisiez jusqu’à maintenant » ».
Le Conseil d’État précise dans sa décision : « Il reviendra au gouvernement, s’il souhaite prendre un nouveau décret d’application de la loi, de notifier préalablement son projet à la Commission et de respecter les délais imposés par le droit de l’Union européenne avant de l’adopter », laissant la porte ouverte à une troisième mouture du texte, sur lequel le Gouvernement serait déjà en train de travailler.