Fongicides SDHI, toxiques pour les cellules humaines

Les fongicides inhibiteurs de la succinate déshydrogénase, dits SDHI, sont utilisés en agriculture pour lutter contre les champignons et les moisissures. Ils inhibent (bloquent) une enzyme impliquée dans la respiration cellulaire, la succinate déshydrogénase (SDH). Suite à une première alerte de médecins et chercheurs en avril 2018 sur la toxicité potentielle des fongicides SDHI, une étude (en anglais) publiée dans la revue scientifique PLOS One le 7 novembre dernier confirme les dangers de cette famille de produits phytosanitaires.

Selon cette étude, huit molécules SDHI commercialisées en France inhibent l’activité des SDH des champignons mais bloquent également celle des cellules de l’abeille, du ver de terre ou de l’être humain. Comme le résume Pierre Rustin, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et co-auteur de l’étude, pour le journal Libération, « l’effet des SDHI n’est pas spécifique à la cible prétendue ». Cela est connu des fabricants puisqu’ils vendent également ces produits pour tuer certains vers qui infestent les terrains de football ou de golf. Le chercheur estime qu’ « avec ce type de fongicides, on provoque probablement une catastrophe écologique et sanitaire, car ils tuent tout, pas seulement les champignons ».

Toujours selon le chercheur, « les SDHI de dernière génération, qui viennent d’arriver sur le marché, ne bloquent pas que l’enzyme SDH mais aussi d’autres éléments dans les mitochondries, ce qui les rend d’autant plus dangereux et toxiques ». Or, les mitochondries jouent un rôle crucial dans le métabolisme cellulaire puisqu’elles sont les « usines énergétiques des cellules », comme le rappelle le journal Le Monde. Leur dysfonctionnement est reconnu comme un facteur pouvant être à l’origine, ou contribuer à, de nombreuses pathologies chez l’homme, tout particulièrement neurodégénératives. Ce constat est d’autant plus inquiétant qu’une analyse de l’Autorité européenne de sécurité des aliments menée en 2016 a révélé que, le boscalid, qui est l’une des molécules SDHI les plus utilisées dans les cultures (blé, tournesol, colza, carottes, pommes de terre, …), est le résidu de pesticide le plus fréquemment retrouvé dans les aliments au niveau européen.

Suite à la publication de cette étude, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), qui avait conclu mi-janvier à l’absence d’alerte sanitaire concernant les SDHI, rappelle qu’elle poursuit ses travaux sur « de potentiels effets de ces substances sur la santé en conditions réelles d’exposition ». Elle annonce qu’elle prendra en compte ces nouveaux résultats tout en soulignant que la recherche a été effectuée sur des cellules in vitro.

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À retenir

  • Les SDHI (inhibiteurs de la succinate déshydrogénase) sont des composés chimiques présents dans de nombreux fongicides utilisés en agriculture. Ils stoppent le développement de champignons parasites et de moisissures en bloquant l’activité de la SDH, enzyme clé de la respiration cellulaire.
  • Dans une étude, publiée dans la revue Plos ONE le 7 novembre 2019, des scientifiques français ont mis en évidence que certains fongicides SDHI ne se contentent pas d’inhiber l’action de la SDH des champignons, mais sont capables de bloquer celle du ver de terre, de l’abeille et de cellules humaines.
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