Après l’eau, le sable est la deuxième ressource la plus exploitée dans le monde. On le retrouve dans de nombreux matériaux, mais contrairement à une idée reçue, ce n’est pas une ressource si abondante. Aujourd’hui, sa surexploitation est jugée très préoccupante.
Béton, verre, ordinateurs, routes, téléphones portables… Leur point commun ? Ils sont tous fabriqués à partir de sable. En effet, il entre dans la composition de nombreux produits de consommation courante. De nos habitations jusqu’à la puce électronique de notre carte bancaire, il serait aujourd’hui presque inconcevable de s’en passer. La demande mondiale a triplé ces 20 dernières années, atteignant près de 50 millions de tonnes par an. L’ONU tire la sonnette d’alarme dans un rapport paru en 2019 : « Sable et développement durable : Trouver de nouvelles solutions pour la gouvernance environnementale des ressources mondiales en sable ».
BTP : secteur le plus gourmand
Le secteur de la construction est le plus gros consommateur de sable. Deux tiers des constructions mondiales sont faites en béton, un matériau constitué de deux tiers de sable et d’un tiers de ciment.
La demande est aujourd’hui en forte augmentation dans les pays d’Asie. D’une part, en raison du « boom » économique et démographique qui entraîne une forte urbanisation de certaines régions (la Chine concentre à elle seule 60 % du sable consommé chaque année). D’autre part, en raison de projets de construction pharaoniques nécessitant des quantités gigantesques de sable, comme l’archipel d’îles artificielles « Palm Island » à Dubaï ou la poldérisation de certaines villes, comme Singapour qui gagne du terrain sur la mer pour étendre sa superficie.
Une ressource pas si abondante
Nous avons tendance à penser que le sable ne manque pas. D’ailleurs, le volume total sur la planète est estimé à 120 millions de milliards de tonnes. Entre la terre, la mer et les déserts, le sable est partout. Pourtant, tout le sable que l’on voit n’est pas forcément accessible ni exploitable. Celui des déserts par exemple est trop fin pour être aggloméré dans la fabrication de ciment.
De plus, sa régénération est perturbée par la présence des quelque 60 000 grands barrages à travers le monde. Ces derniers retiennent les sédiments qui devraient se diriger vers la mer et les plages via le lit des rivières. Près d’un quart du sable mondial est ainsi retenu…
Dégâts environnementaux
D’où provient donc le sable exploitable ? Il est majoritairement extrait dans mines ou carrières terrestres. L’Alsace possède d’ailleurs un important gisement alluvionnaire, étendu du Nord au Sud, composé notamment de sables et de granulat utilisés pour la confection de mortiers, de bétons, d’enduits, de briques, etc. Les matériaux extraits de ce gisement couvrent plus de 90 % des besoins alsaciens en granulats . Mais la forte augmentation de la demande entraîne l’épuisement des réserves et conduit les industriels à creuser ailleurs, c’est-à-dire au fond des océans. Aujourd’hui, 75 millions de tonnes de sable marin sont extraits chaque année dans le monde, ce qui représente 2,5 % de la production totale de sable. Mais cette exploitation est vouée à s’accélérer tandis que les dégâts environnementaux se font déjà sentir : disparition progressive des plages (le sable prélevé en mer le long des côtes génère des trous qui sont naturellement comblés avec du sable provenant des plages, ce qui provoque l’érosion du littoral), la détérioration de la faune et de la flore (les organismes vivants des fonds marins sont éliminés à mesure que le sable est aspiré), l’affaiblissement de la protection des côtes face aux tempêtes ou encore la salinisation des terres agricoles via l’infiltration d’eau de mer, les rendant inexploitables.
L’extraction de sable conduit également à la disparition de certaines îles. C’est le cas en Indonésie où 25 îles ont disparu pour alimenter Singapour en sable…
En outre, le sable fait l’objet de trafic, avec des exploitations illégales dans certains pays, générant de la corruption, des guerres de territoires et la mise en danger des populations.
Alternatives durables ?
Plutôt que de creuser toujours plus, ne peut-on pas plutôt recycler les matériaux existants ? C’est la solution vers laquelle se penchent de nombreux professionnels du granulat. En France, le secteur du BTP engendre 260 millions de tonnes de déchets chaque année et seule une infime partie est recyclée. C’est pourquoi en 2014 le programme national Recybeton a été lancé. L’objectif est d’augmenter le taux de réincorporation des granulats recyclés dans le béton afin de préserver les gisements naturels de granulats et permettre l’essor économique des professionnels du secteur des déchets de construction.
Il convient aussi de privilégier d’autres matériaux comme le bois, la paille ou la terre. Et surtout, de revoir la pertinence des projets de construction à grande échelle.
POUR ALLER PLUS LOIN
Que faire à notre échelle ?
Chaque consommateur peut agir notamment lors de ses travaux de construction, de rénovation ou de démolition. Dans ce cas, nous réglons des frais pour l’évacuation des gravats et la mise en déchèterie. Cette collecte permet de recycler ces gravats et donc de limiter le recours à de nouvelles ressources. Mais l’accès aux déchèteries est payant pour les professionnels. Certains n’hésitent pas à se débarrasser de ces déchets encombrants dans des lieux non autorisés. Demandez à l’entrepreneur qu’il présente un certificat de dépôt en déchèterie pour vous assurer de la démarche.
A Strasbourg, l’association BOMA – Les BOnnes Matières propose d’appliquer les principes de l’économie circulaire au secteur du BTP.
Sources :
« Le sable, une ressource qui pourrait bien nous filer entre les doigts » – www.qqf.fr
« La pénurie de sable, c’est pour bientôt ! » – www.natura-sciences.com