Le 1er novembre 2018, des centaines de consommateurs ont vu leur téléphone bloqué par Free. L’opérateur les a « blacklistés » car l’IMEI de leur téléphone (un numéro unique de 15 à 17 chiffres, propre à chaque téléphone) avait été inscrit au registre des appareils volés ou perdus. D’après l’opérateur, il s’agirait de téléphones loués par leurs services. Mais certains clients, au lieu de les restituer à Free, les ont revendus sur le Bon Coin ou à un magasin de produits d’occasion, en toute illégalité.
Plus de 700 personnes seraient concernées. Certains avaient acheté leur téléphone d’occasion encore sous emballage, d’autres avaient bien pris soin de vérifier en amont le numéro IMEI pour s’assurer que le téléphone n’était pas volé. Ils pensaient donc avoir fait une transaction en toute bonne foi. Quant aux magasins d’occasion, ils effectuent toujours cette vérification avant de revendre des appareils. Le problème, c’est que si l’IMEI permet de s’assurer que le téléphone n’est ni volé, ni perdu, il ne permet pas de savoir s’il s’agit d’un appareil loué. Aucune liste des téléphones en location n’est fournie par les opérateurs, affirme l’un des leaders du marché.
Interrogées par le magazine 60 millions de consommateurs, les enseignes Cash Express, Easy Cash et Happy Cash se sont engagées à échanger les téléphones bloqués par un modèle équivalent ou identique. Elles se réservent en revanche le droit de porter plainte contre Free si l’opérateur ne cesse pas ce blocage.
Une capitaine du service d’information et de communication de la police nationale a indiqué à « 60 » que le fait de considérer ces téléphones comme volés serait juridiquement contestable. Il s’agit plutôt d’un abus de confiance. Free a en effet remis volontairement le téléphone au locataire (futur vendeur), alors que dans le cas d’un vol, il n’y a pas de consentement. Free est toutefois également victime dans cette affaire. Par ailleurs, d’après les conditions générales du service de location de mobiles de Free, l’opérateur reste propriétaire de l’appareil qui ne peut être ni cédé, ni loué, ni prêté à un tiers par l’utilisateur. Le fait de payer une pénalité pour non-restitution ne vaut pas non plus transfert de propriété. Free serait donc en droit d’effectuer un blocage, même si cela n’est pas stipulé dans les conditions générales de vente.
Pour autant, l’opérateur n’a pas apporté d’information sur le nombre de téléphones concernés, ni sur la procédure interne qui a mené au blocage (les services de police avaient-ils été prévenus avant ?). Pour les personnes concernées, la police invite à porter plainte contre le vendeur en fournissant un maximum d’éléments (échanges par mail ou sms, coordonnées du vendeur, lieu de la transaction…). S’il s’agit d’un particulier, le consommateur lésé peut faire jouer la garantie des vices cachés (articles 1641 et suivants du Code civil), mais les conditions d’application sont très restreintes. S’il s’agit d’un professionnel, il peut se prévaloir de la garantie légale de conformité (articles L. 217-4 et suivants du Code de la consommation) afin d’obtenir le remplacement ou le remboursement du téléphone. Attention toutefois, cette garantie ne peut être activée que dans les 2 ans suivant l’achat. Dans tous les cas, le consommateur est en droit de demander la nullité de la vente car le vendeur lui a cédé un bien qui ne lui appartenait pas (article 1599 du Code civil sur la vente de la chose d’autrui). Il faut néanmoins qu’il soit en mesure d’identifier le vendeur et de le contacter.