Nos colis voient du pays

Aussitôt acheté, aussitôt renvoyé ! Aujourd’hui, les achats en ligne sont simples et rapides, et les retours facilités par les géants du e-commerce. Mais ces articles voyagent plus que nous ne l’imaginons. Une enquête d’Envoyé Spécial révèle le périple de nos colis en France… et à l’étranger !

D’après le bilan du e-commerce de la Fevad (Fédération e-commerce et vente à distance), les ventes sur Internet ont atteint 112 milliards d’euros en 2020, soit une hausse de 8,5 % par rapport à l’année précédente. Les périodes de confinement ont engendré des pics de vente ainsi qu’une accélération des livraisons à domicile, du cliqué-retiré et du drive.

Retours gratuits… impacts élargis

Les géants du e-commerce ont mis en place des stratégies commerciales qui facilitent les retours, bien souvent gratuits. Parfois, les clients n’ont même rien à débourser avant d’avoir essayé l’article chez eux. Et si la loi prévoit un délai de rétractation de 14 jours, certaines enseignes vont plus loin, comme Amazon qui propose un délai de 30 jours.

Dans un reportage d’Envoyé spécial diffusé le 10 juin dernier, des journalistes ont introduit des traceurs GPS dans des colis Zalando et Amazon. Ils ont pu ainsi évaluer le trajet parcouru par les articles renvoyés.

Chez Zalando, groupe allemand, les colis transitent dans plusieurs entrepôts en région parisienne, saturés en raison de la forte augmentation du volume des ventes, avant de repartir dans un centre logistique… en Allemagne. Le principal objectif est d’augmenter les chances de revendre l’article. En effet, Zalando compte entre 4 et 5 millions de clients en France, contre 30 millions dans toute l’Europe. Les produits de son centre allemand ont six fois plus de chance de trouver preneur. Du côté d’Amazon, les retours clients convergeaient dans un centre à Orléans jusqu’en 2017. Dorénavant, les colis partent dans un entrepôt en Slovaquie, où la main d’œuvre est trois fois moins chère. Même avec le coût du transport en camion, l’opération reste rentable pour le groupe. D’après les calculs des journalistes de France 2, Amazon réaliserait 22 millions d’euros d’économie rien que pour les retours de produits des clients français. Or l’entrepôt slovaque centralise aussi les retours en provenance d’autres pays européens. Certains articles sont remis en vente sur le site. D’autres, déjà ouverts, prolongent leur périple jusqu’en Pologne, dans un centre où ils seront mis en vente par lots auprès de déstockeurs qui les revendront à prix cassés.

À notre échelle, cela peut paraître insignifiant. Mais des milliers de produits transitent ainsi chaque jour en Europe. Les trajets se font généralement par camion (voire par avion pour assurer la livraison en temps et en heure) avec un impact environnemental non négligeable. En France, ce sont 17 millions d’articles Amazon qui sont renvoyés chaque année. Ainsi, en expédiant les produits vers son centre logistique en Slovaquie, le groupe émettrait autant de CO2 qu’un avion effectuant 2 125 fois le tour de la Terre en un an !
Enfin, certains articles (parfois neufs) partent directement au rebut dans des pays de l’Est, générant toujours plus de déchets.

Que faire pour minimiser l’impact carbone de nos colis ?

Les consommateurs ne sont hélas pas suffisamment informés de ce phénomène. Les géants du web brouillent les pistes en communiquant sur leurs efforts en matière de protection de l’environnement et de réduction de leur empreinte carbone. Un discours « vert » parfois éloigné de la réalité. Comment pouvons-nous agir ? Il ne s’agit pas de diaboliser les achats en ligne qui sont très pratiques, notamment dans cette période de crise sanitaire. Mais en tant que consommateur, nous pouvons adopter un comportement plus responsable, en veillant à n’acheter que ce dont nous avons besoin et en quantité raisonnable. Nous limiterions ainsi les allers-retours incessants à travers le continent.

Quand cela est possible, mieux vaut privilégier l’achat en boutique ou en ligne avec un retrait en magasin. La quasi-totalité des commerçants proposent aussi un droit de retour. L’article qui ne convient pas pourra être retourné en boutique et remis en rayon. Par ailleurs, l’achat d’occasion et le déstockage sont de bons moyens de faire des économies tout en limitant l’impact environnemental (mais dans ce cas le retour n’est pas possible).

Mais cela n’est pas suffisant, tout simplement parce que ce n’est pas au seul consommateur de faire les efforts. S’il est essentiel que chacun.e prenne conscience de l’impact de ses comportements, rien ne saurait remplacer des changements structurels en profondeur. A commencer par mettre ces grandes entreprises, qui font des millions d’euros de chiffre d’affaires, face à leurs responsabilités.

Vos droits en cas de retard de livraison

La directive 2011/83/UE protège les consommateurs réalisant un achat en ligne au sein de l’Union européenne. Le vendeur est tenu de livrer le colis dans le délai imparti (soit celui qu’il a indiqué, soit celui convenu avec le client). S’il ne donne pas cette information, le colis doit être livré dans un délai maximum de 30 jours après la date de conclusion du contrat.

En cas de retard, le client peut mettre en demeure le vendeur par courrier recommandé avec accusé de réception de livrer le colis dans un délai supplémentaire raisonnable (de 10 à 15 jours par exemple).

Une fois ce délai complémentaire écoulé, et si le colis n’a toujours pas été livré, le client peut annuler le contrat sans délai ni pénalités par un nouveau recommandé avec avis de réception. Le vendeur doit procéder au remboursement dans les 14 jours de la réception de la mise en demeure. S’il ne respecte pas ce délai, des pénalités de 10 à 50 % de la somme due seront appliquées.

À noter toutefois que si le client reçoit son colis avant la réception du recommandé par le professionnel, l’annulation ne sera pas prise en compte.

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