Pénurie de beurre, que se passe-t-il ?

Les professionnels la prédisent depuis plusieurs mois ; la pénurie du beurre est à présent bien installée. Certains supermarchés sont même en rupture de stock. En cause, une hausse de la demande couplée à une production peu dynamique.

D’après la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), la consommation de beurre a augmenté de 2,5 % entre 2013 et 2015. Cela s’expliquerait par un retour en grâce des matières grasses animales, longtemps décriées par les nutritionnistes. Par ailleurs, la Chine est devenue une grande consommatrice de beurre, avec un intérêt tout récent pour les viennoiseries.

Du côté de la production, en revanche, la tendance est à la baisse, notamment en Nouvelle-Zélande, premier importateur mondial de lait. Et la fin des quotas laitiers en Europe il y a deux ans a provoqué une réaction en chaîne : surproduction, chute des cours, faillite d’un certain nombre d’éleveurs, baisse de la production. La France est par ailleurs touchée par une récolte fourragère particulièrement médiocre, entraînant une chute de 2,8 % de la production de lait entre 2015 et 2016.  Les cours du beurre, quant à eux, n’ont jamais été aussi hauts.

La France est l’un des premiers pays producteurs européens de beurre (450 000 tonnes en 2016). Mais elle est loin d’être autosuffisante et importe environ 200 000 tonnes par an. Augmenter la production de lait n’est pas une solution. En effet, un litre de lait contient en moyenne, 42 grammes de matières grasses – qui servent à la fabrication du beurre et de la crème – et 33 grammes de protéines – utilisés pour le lait liquide et la poudre de lait. Or, ces deux derniers produits sont excédentaires, au point que la Commission européenne a enclenché, depuis deux ans, un mécanisme de régulation du marché et stocke 380 000 tonnes de poudre de lait. « En augmentant la production de lait, on risque d’accroître l’excédent de poudre, faire encore baisser le prix de ce marché, mettre en difficulté des éleveurs et donc faire baisser la production », s’inquiète Gérard Calbrix, directeur des affaires économiques à l’Association de transformation laitière française (Atla).

De leur côté, les éleveurs demandent à la grande distribution d’augmenter les prix des plaquettes de beurre (qui n’ont pas beaucoup évolué ces dernières années). Mais à plus long terme, il faudrait aussi réviser les pratiques d’élevage. « Pendant des années, nous avons produit trop de beurre et donc tout mis en œuvre pour inciter les éleveurs à produire un lait riche en protéines et non en matières grasses, explique Philippe Chotteau, à l’Institut de l’élevage. C’est cela qu’il faut revoir, en réintroduisant de nouvelles races de vaches et en repensant le système de paiement du lait au moyen d’une prime versée à ceux qui produisent un lait riche en matières grasses. »

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