Au 1er janvier 2024, les Français devront trier leurs biodéchets, afin que les 5,5 millions de tonnes de déchets verts et alimentaires jetés chaque année puissent être valorisés. Si la mesure est prévue dans la loi « Anti-gaspillage pour une économie circulaire » (AGEC) de 2020, à 3 mois de l’échéance, les collectivités ne sont pas prêtes.
Seul un quart des Français sera prêt
Les biodéchets sont actuellement enfouis ou incinérés, des solutions énergivores et polluantes, alors qu’ils pourraient être compostés pour produire du fertilisant ou du biogaz par le biais de la méthanisation. C’est justement l’objectif de la mesure.
Selon une étude de l’Agence de la transition écologique (Ademe) publiée en 2022, une centaine de collectivités offrent aujourd’hui à leurs usagers une collecte séparée des biodéchets, ce qui représente 6,2 % de la population du pays. Or, toujours selon les estimations de l’Agence, seul un quart des Français aura la possibilité de trier effectivement ses déchets au 1er janvier 2024.
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Mesure peu claire et trop coûteuse
Pour expliquer ce retard, Sébastien Roussel, directeur Île-de-France de Moulinot, entreprise pionnière de la valorisation des biodéchets, pointe un manque d’information des collectivités. Les besoins et solutions étant différents selon les villes et leur typologie, la mise en place de cette mesure nécessite « une vraie stratégie (…) et une vision intégrée de la filière », précise-t-il. Plusieurs acteurs doivent se rencontrer et coopérer pour la mise en œuvre de solutions complémentaires entre elles, ce qui a rarement été fait.
Ensuite, le coût de la mesure représente un frein pour de nombreuses collectivités. L’inflation et la crise énergétique les impactent fortement, et les mécanismes de soutien de l’État prévus pour appuyer la mise en œuvre de la collecte des biodéchets ne compenseraient pas suffisamment leurs difficultés financières.
Pas de contrôle, ni de sanction…
Enfin, l’absence de contrôle et de sanction n’incite pas vraiment à l’action. L’association Zéro Waste réclame à ce titre l’adoption d’un décret d’application, définissant « des objectifs quantitatifs clairs de détournement des biodéchets de la poubelle d’ordures ménagères résiduelles » et comprenant « une obligation de moyens et de résultats ».
Si l’association préconise des sanctions financières, les acteurs de la filière préfèrent pour le moment sensibiliser sur la qualité du tri et convaincre de la pertinence de ce nouveau geste.
À ce propos, Stéphane Duru, responsable du pôle déchets au sein de l’association Amorce, réseau d’accompagnement des collectivités, rappelle qu’une unique campagne ne sera pas suffisante : « C’est une communication sans fin, en particulier dans les grandes agglomérations où il y a un turn-over des populations ».