Les « assistants personnels intelligents » ou « assistants vocaux » sont des objets connectés qui permettent d’effectuer une recherche vocale. Ils sont présentés comme des outils destinés à nous simplifier la vie : effectuer des requêtes simples, demander des informations sur la météo, gérer le pilotage de la musique ou encore rédiger un message. Les plus connus sont Alexa d’Amazon et Google Home de Google, qui ont été précédés par « Cortana » de Microsoft et « Siri » d’Apple sur ordinateurs et smartphones.
Le phénomène est récent et les usages encore disparates. Si 81 % des Français déclarent connaître au moins un assistant vocal, on ne compte que 19 % d’utilisateurs réguliers selon un baromètre réalisé par My Media. Le taux d’équipement avoisinerait les 1 % mais le potentiel de développement est important. En effet, 35 % des Français interrogés jugent ces outils utiles et 13 % de ceux qui n’en possèdent pas souhaitent s’équiper.
Mais ces nouvelles technologies génèrent également quelques réticences. Il y a, d’une part, une inquiétude concernant la collecte de données personnelles. Ces assistants sont placés au cœur de la vie de ses usagers, dans leur maison et donc dans leur intimité. Les conversations peuvent-elles être enregistrées ? Conservées ? Utilisées à des fins commerciales ? Comment éviter les dérives ?
D’autre part, certains s’inquiètent des effets induits par une modification des usages d’Internet. Le recours à la recherche vocale élimine de facto le recours à une interface graphique. De ce fait, l’utilisateur pourra se contenter d’une réponse unique à sa question (là où les moteurs de recherche proposent sur une page plusieurs résultats). Si cela ne porte pas à conséquence pour la météo, qu’en est-il lorsqu’il s’agit de requêtes plus complexes, sujettes à interprétation et pouvant appeler différentes réponses ? (Par exemple des questions d’ordre historiques ou politiques ?). Cette question en amène une autre : quid de la hiérarchisation des réponses ? Si l’assistant vocal se contente de donner une seule réponse là où il pourrait y en avoir plusieurs possibles, comment la choisit-il ? Guillaume Champeau, qui travaille pour le moteur de recherche respectueux de la vie privée Qwant, s’interroge sur la place des annonceurs dans ce contexte. Il risque d’y avoir une « enchère » des annonceurs pour être le premier cité… De même en ce qui concerne des sujets d’actualité : vers quel médias votre assistant vocal va-t-il se tourner ? Le Figaro ou l’Humanité ? La ligne éditoriale ne sera pas la même…
Enfin, certains voient d’un mauvais œil la « dé-chosification » des objets connectés. En clair, laisser leur juste place aux outils technologiques qui, même si on a l’impression qu’ils nous parlent, ne sont pas humains. Cela peut sembler évident mais de nouvelles fonctionnalités incitent notamment les enfants à dire « s’il te plait » et « merci » aux assistants vocaux. Cela les conforte dans l’idée qu’il s’agit de « vraies personnes » et nous questionne d’une manière générale sur notre rapport à la technologie. S’il ne nous vient pas à l’idée de remercier la télé ou le grille-pain, pourquoi le faire avec une intelligence artificielle ? La journaliste indépendante Titiou Lecoq s’en émeut : « Non seulement on se retrouve à inverser le rapport entre l’humain et la machine, mais c’est même carrément le rapport entre le vivant et l’objet ».