Fraude massive à la TVA dans l’e-commerce

L’Inspection Générale des Finances (IGF) a découvert un phénomène de fraude massive à la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) sur les places de marché des plateformes de vente en ligne comme Amazon ou Cdiscount. Le journal Les Échos a obtenu une copie du rapport de l’IGF faisant état de la situation. D’après celui-ci, 98 % des vendeurs enregistrés sur les « marketplaces » des sites d’e-commerce ne sont pas immatriculés à la TVA en France. Seuls 538 des 24 459 vendeurs contrôlés par l’administration étaient en règle !

Si les consommateurs dénichent de bonnes affaires et des prix cassés sur les sites de commerces en ligne, c’est donc en partie parce que la TVA n’est pas appliquée par le vendeur. Le rapport de Bercy souligne que les vendeurs « bénéficient ainsi d’un avantage de prix de 20 % par rapport aux sociétés qui remplissent leurs obligations fiscales en matière de TVA, créant une distorsion majeure de concurrence ». A ce titre, les acteurs traditionnels du commerce dénoncent un véritable « Far West » fiscal.

Il s’avère que la fraude à la TVA est l’une des principales pertes de recettes pour le budget de l’État, sans que son ampleur ne soit chiffrée précisément. Les inspecteurs des finances estiment toutefois que « les montants en jeu sont considérables », comme le rapporte le journal Les Échos. La Direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) a ainsi constaté que, sur 43 vendeurs contrôlés, ce sont 285 millions d’euros de chiffre d’affaires qui échappaient à la TVA. Or, on dénombre plus de 100 000 boutiques en lignes en 2019, dont 40 % sont domiciliées en Chine. Ces informations ont été transmises au parquet national financier par la DNEF suspectant « une fraude massive à la TVA dans le secteur des grandes plateformes ». Ces chiffres sont d’autant plus inquiétants que les « marketplaces » n’ont cessé de prendre de l’ampleur ces dernières années sur un marché de l’e-commerce qui est aujourd’hui estimé à 92,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires en France. Selon les informations diffusées par le journal Les Échos, la place de marché d’Amazon représente aujourd’hui 58 % de son activité, contre 3 % il y a vingt ans. Cette part est estimée entre 30 % et 40 % de l’activité pour le site Cdiscount.

En théorie, les vendeurs étrangers présents sur les « marketplaces » doivent désigner un représentant fiscal en France pour remplir leurs obligations en matière de TVA « dès que le montant de leurs ventes dépasse 35 000 € ou qu’elles utilisent le service de livraison d’Amazon ou d’une autre plateforme ». Toutefois, cette procédure est jugée trop complexe par ces vendeurs. Par ailleurs, les représentants fiscaux refusent régulièrement les demandes de ces sociétés d’e-commerce. En effet, en cas d’erreur dans les informations transmises par ces dernières, la responsabilité des représentants fiscaux peut être mise en jeu.

Le projet de loi de finances pour 2020 va répondre à une partie de cette problématique en transposant une directive européenne. A compter de 2021, les plateformes d’e-commerce comme Amazon ou Cdiscount deviendront redevables de la TVA pour leurs vendeurs en ligne. Selon l’IGF, cela « couvrira un grand nombre, mais pas l’intégralité des situations possibles » puisque certaines transactions pour les fournisseurs hors de l’Union européenne sont exclues. Pour aller plus loin, l’IGF a étudié divers moyens de sécurisation du recouvrement de la TVA, dont la collecte de la TVA à la source par les banques. Selon son rapport, cette solution apparaît complexe à mettre en œuvre et serait très coûteuse. Bercy préconise donc plutôt de généraliser la facturation électronique à l’horizon 2023-2025.

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À retenir :

  • Selon l’Inspection Générale des Finances, 98 % des vendeurs enregistrés sur les places de marché des plateformes de vente en ligne comme Amazon ou Cdiscount ne sont pas immatriculés à la TVA en France. Ces vendeurs n’appliquent donc pas la TVA ce qui peut expliquer les prix cassés sur certains produits du e-commerce.
  • La fraude à la TVA est l’une des principales pertes de recettes pour l’État. Si le chiffre global n’est pas connu, « les montants en jeu sont considérables » selon les inspecteurs des finances. Or, les places de marché ou « marketplaces » représentent une part de plus en plus importante de l’activité des plateformes de vente en ligne.
  • Afin de faire face à cette fraude massive, et conformément à la règlementation européenne, les plateformes d’e-commerce deviendront redevables de la TVA pour leurs vendeurs en ligne à compter de 2021.
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