Claire Hédon* dresse un premier bilan de la plateforme anti-discriminations dans une interview au journal Le Monde.
Défendre l’accès aux droits pour tous
Lancée le 18 février dernier, cette plateforme permet aux citoyens de signaler tout type de discrimination via un numéro de téléphone, le 39 28, ou le site Internet. En un mois, 11 000 contacts ont été enregistrés, dont 3 000 appels téléphoniques d’une durée moyenne d’un quart d’heure. Ces appels sont réceptionnés par des juristes qui apportent de premiers éléments de réponses. Seuls 20 % de ces prises de contact donnent lieu à une véritable saisie du Défenseur des droits.
Les discriminations les plus dénoncées concernent l’emploi et le logement, principalement en raison de l’origine étrangère, ou perçue comme telle, des personnes. Viennent ensuite les discriminations liées au handicap, l’état de santé, l’apparence physique et… Le fait d’être une femme. « Je suis surprise de voir que l’on constate encore des discriminations au retour de congé maternité avec des femmes qui ne retrouvent pas leur poste ni leur salaire », indique la Défenseure des droits. « L’aménagement des postes de travail pour les personnes en situation de handicap reste également un sujet mal connu et mal traité », ajoute-t-elle.
La médiation comme solution
L’objectif de cette plateforme est de favoriser la médiation. Cela permet de trouver des solutions et résoudre des problèmes sans recourir à la justice. De nombreuses personnes composant le 39 28 font part de leur désarroi devant des procédures jugées trop compliquées. Or, la question de la preuve peut se révéler complexe. Claire Hédon précise que « certaines personnes se mettent manifestement trop de freins (…) Notre rôle est de leur expliquer que nos juristes sont peut-être mieux placés qu’eux-mêmes pour apprécier les éléments de preuve ».
L’impact de la crise sanitaire
Par ailleurs, la crise sanitaire a entraîné une augmentation de 50 % des appels sur la plateforme téléphonique du Défenseur des droits en 2020, avec des pics pendant le premier confinement. Ces contacts ont permis de mettre en lumière les difficultés des personnes les plus précaires. La Défenseure des droits explique : « La crise sanitaire a aggravé une situation qui préexistait, avec des difficultés croissantes d’accès aux services publics et des délais de réponse de plus en plus longs ». La dématérialisation croissante des démarches présente certes des aspects bénéfiques… Mais elle a engendré des obstacles pour certaines personnes, et pas seulement celles ne disposant pas de connexion Internet. Les jeunes ne sont pas toujours à l’aise avec les démarches administratives en ligne par exemple.
Si les trois quarts des réclamations traitées trouvent une issue favorable grâce à la médiation, la question du non-recours reste un sujet majeur pour Claire Hédon.
*ancienne présidente d’ATD Quart Monde et Défenseure des droits depuis le 22 juillet 2020