A leur apogée entre les années 1930 et 1970, l’offre de trains de nuit a fortement déclinée, notamment au profit des autocars de nuit. Pourtant ils connaissent un succès inattendu en Autriche. Et selon une étude de la FNAUT, les Français n’en n’ont pas fini avec ce mode de transport. Va-t-il revenir au goût… de la nuit ?
Traverser la France (ou l’Europe) à bord de trains couchettes, de wagons-lits et autres trains dotés ou non de cabines avec toutes les commodités (toilettes, douches, lavabos) étaient pendant des années une pratique assez courante. Cependant, l’essor des lignes de train à grande vitesse, de l’avion et des autocars (appelés « cars Macron ») leur ont fait perdre du terrain. Entre 2011 et 2016, les 8 lignes de la métropole accusaient une baisse de fréquentation de -25 %.
Quasi-disparition
Le réseau des trains de nuit en France a été démantelé en 2016 et 2017. Seules les lignes Paris-Briançon et Paris-Rodez/Latour de Carol sont maintenues, faute d’alternatives suffisantes. En 2018, la ministre des Transports de l’époque, Élisabeth Borne, avait annoncé que ces deux lignes seraient rénovées pour un montant de 30 millions d’euros, précisant alors « La convention actuelle entre l’Etat et la SNCF doit s’arrêter en 2020 : je vous annonce qu’elle sera reconduite au-delà (…) ». Elles ne devraient donc pas être menacées. Mais est-ce suffisant ? Pas sûr, si l’on en croit la pétition en ligne sur le site change.org, « Oui au train de nuit ! », lancée par le collectif du même nom et qui a recueilli à ce jour plus de 186 000 signatures. Ce collectif, réunissant des groupes locaux dans différentes régions, défend ce mode de transport et demande à l’Etat et la SNCF sa réhabilitation. Il développe un argumentaire détaillé sur le site ouiautraindenuit.wordpress.com. Parmi les arguments développés, la possibilité d’arrivée à destination tôt le matin et de profiter ainsi de la journée entière. Le train de nuit permet aussi de desservir des villes moyennes, là où les grandes lignes connectent principalement les grandes métropoles régionales à Paris. Ce mode de transport est aussi moins énergivore, permet de parcourir de longues distances et serait également plus sobre en financement public, à condition que la qualité de service soit améliorée. La preuve avec le modèle autrichien qui fonctionne très bien.
L’exemple autrichien
La compagnie nationale autrichienne ÖBB développe son réseau de nuit depuis 2016 et est aujourd’hui leader en Europe avec 1,4 million de passagers empruntant les 26 lignes du réseau chaque année. Alors que ce modèle était peu à peu abandonné partout en Europe, le choix de la compagnie autrichienne a surpris à l’époque. Pourtant, ces trains sont devenus rentables en à peine trois ans, notamment grâce à un positionnement haut de gamme. Un véritable succès. Kurt Bauer, responsable des grandes lignes pour ÖBB indique : « rien que cette année [2019], nous avons eu une augmentation de 10 % de la demande ! C’est un marché de niche et cela le restera vraisemblablement mais les trains de nuit représentent 16 à 18 % du chiffre d’affaires de nos grandes lignes. C’est donc déjà une proportion importante ».
Selon la compagnie, un tiers des voyageurs choisissent ce mode de transport pour des questions environnementales. Il est pour eux une bonne alternative à l’avion, bien que le trajet soit plus long et plus cher. C’est également un choix plébiscité par les familles qui voyagent avec de jeunes enfants, pour son côté pratique.
Retour en France ?
Le 4 février 2020, la Fédération Nationale des Associations d’Usagers des Transports (FNAUT) a lancé un questionnaire sur les trains de nuit afin de mieux connaître les attentes du public concernant ces trains. Quelque 3 492 réponses ont été reçues entre le 4 février et le 4 avril 2020. La FNAUT a publié les résultats en juillet et révèle que les Français y sont plutôt favorables.
Parmi les enseignements de l’enquête, la nécessité pour le train de nuit de prendre en compte des clientèles variées (voyageurs modestes, familles, hommes d’affaires) et de diversifier l’offre (couchettes, voitures-lits, sièges inclinables…). Les répondants demandent un départ tardif et une arrivée matinale, et attendent des possibilités variées de restauration. Le confort est également ce qui est le plus important pour eux (accessibilité, intimité, propreté, sûreté, des espaces pour les femmes, des douches…). Des demandes bien devant les services électroniques, comme le Wi-Fi, qui ne sont pas une priorité. Enfin la tarification doit rester modérée.
Pour la FNAUT, la demande du public reste forte et la disparition des trains de nuit n’est pas inéluctable reprenant pour cela l’exemple de la compagnie ÖBB.
Du côté du gouvernement, Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué aux transports a annoncé la relance de deux lignes de train de nuit supplémentaires d’ici 2022. « Pourquoi pas, un Paris-Nice pour commencer » a-t-il déclaré. Le début peut-être d’une renaissance ?
Cet été, cap sur l’autoroute ?
En attendant de pouvoir peut-être reprendre le train de nuit, les Français semblent se tourner davantage vers la voiture pour leur départ en vacances en 2020. En cause notamment, la crise sanitaire qui incite à minimiser au maximum les contacts avec d’autres personnes. Les aires d’autoroutes (364 aires de stations-service et 637 aires de repos) sont en tout cas prêtes à faire face à l’afflux de voyageurs avec des mesures sanitaires adaptées : renforcement des services de nettoyage, distribution de gel hydroalcoolique, mise à disposition de nappe pour les pique-niques, définition d’un sens de circulation dans les restaurants, possibilité de commander son repas à distance via une application, food-truck… La distanciation sociale doit être respectée et le port du masque, s’il n’est pas obligatoire, est fortement recommandé. Quant aux animations pour les enfants, il n’y en a pas pour éviter les contacts.