Alors que le bio avait le vent en poupe ces dernières années, aujourd’hui c’est la douche froide. Selon le magazine Bio Linéaires, près de 200 magasins bio ont fermé en 2022. Par ailleurs, une enquête de NielsenIQ révèle que les ventes de produits bio ont reculé de 7,4 % en grandes surfaces cette même année. Les enseignes spécialisées Biocoop, Naturalia et Le Comptoir du bio indiquent une chute de 12 % de leurs ventes. Que s’est–il passé ?
Face à la crise, une aide de l’État jugée insuffisante
En premier lieu, dans un contexte généralisé de crise économique, la filière pâtit d’un manque de soutien de la part des pouvoirs publics. Plusieurs représentants de la filière, dont la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB), dénoncent « un sentiment d’abandon de la part des pouvoirs publics qui laissent les structures économiques gérer seules les baisses de volumes, dans un contexte où nos collègues en conventionnel bénéficient régulièrement de plans d’aides ».
Le gouvernement a débloqué un fond d’urgence de 10 millions d’euros à destination des exploitations rencontrant de graves difficultés économiques, avec un risque de déconversion. Cette aide vient en complément du Fonds avenir BIO 2023, porté à 15 millions d’euros pour soutenir la dynamique de l’ensemble de la filière. Mais ce n’est pas suffisant, selon Mathieu Lancry, Président de Forebio : « Vu l’ampleur de la crise en bio, pour les seules filières porcs, lait et fruits et légumes, nous avons besoin de 150 millions d’euros ».
Résultat, en 2023, le bio connait un phénomène de déclassement, des produits bio étant vendus comme du conventionnel. Sont concernés, particulièrement, la filière lait, mais également les éleveurs. Sur un marché du bio saturé, ces derniers sont contraints d’écouler leurs animaux sur le marché du conventionnel. Cela entraîne un manque à gagner conséquent. En effet, les fermes labellisées en bio emploient plus de personnel qu’en conventionnel. Un manque de soutien des pouvoirs publics d’autant plus incompréhensible que l’État français s’est fixé pour objectif de convertir 18 % des surfaces agricoles utiles cultivées en bio d’ici 2027. Ces surfaces stagnent aujourd’hui à 10 %. Les agriculteurs convertis au bio dans l’espoir d’être mieux rémunérés ne trouvent plus suffisamment de débouchés et sont davantage en difficulté.
L’information sur le bio à améliorer
En second lieu, la défiance des consommateurs s’est accrue ces dernières années. Tout d’abord en raison des prix, souvent plus élevés. D’après le 20e baromètre de l’Agence Bio 2023, ils sont en effet le premier frein des consommateurs. Mais ces derniers sont également plus nombreux à remettre en question la réalité du bio. 57 % des non–consommateurs de produits bio invoquent cet argument, soit 17 % de plus par rapport à 2021. Ce baromètre révèle aussi que 61 % des Français considèrent que le bio « est avant tout du marketing ». Ensuite, intervient la concurrence d’autres démarches. Le label Haute valeur environnementale, les produits locaux, régionaux, sans pesticide, sans OGM, sans huile de palme… Labels et mentions se multiplient et minent la filière en semant la confusion auprès des consommateurs.
« Plus que jamais, il est nécessaire que les consommateurs soient régulièrement informés sur les bienfaits du bio, et outillés sur les moyens pour manger plus de bio au quotidien quel que soit leur budget », estime l’Agence Bio face à ces résultats.