Une récente étude révèle que la baisse du chômage n’entraîne pas celle du taux de pauvreté. Ce dernier a tendance à s’aggraver en particulier pour les indépendants, les personnes invalides et les inactifs.
Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) a publié le 7 mai dernier un panorama de l’évolution de la pauvreté et l’exclusion sociale entre 2015 et 2022. Il révèle que le « taux de pauvreté monétaire (au seuil de 60 % de la médiane des niveaux de vie) et le taux de privation matérielle et sociale sont restés à un niveau élevé ».
Sur cette période, la part des personnes se considérant comme pauvres est passée de 12,4 % à 18,7 % tandis que le chômage a diminué de 3 points dans le même temps.
Trois causes identifiées
Le CNLE a identifié trois principales causes pour expliquer ce paradoxe :
1. Des créations d’emplois précaires, qui n’entraînent pas une sortie de la pauvreté (contrats temporaires, à temps partiel ou sous statut de micro-entrepreneur) ;
2. Une dégradation de la situation des inactifs, notamment les retraités et personnes en invalidité ;
3. Des foyers déjà fragilisés qui sont passés sous le seuil de pauvreté sans que leur niveau de vie ait changé. Ils sont victimes de ce que l’on appelle « l’effet de seuil » : le seuil de pauvreté monétaire augmente mécaniquement du fait de l’augmentation du niveau de vie médian. De fait, les personnes dont le niveau de vie a moins progressé sont passés sous ce seuil.
Des retraités plus touchés par la pauvreté
Le taux de pauvreté des retraités est en hausse depuis 2017 et s’établit à 10,8 % en 2022. Jusqu’en 2015, le renouvellement de la population des retraités entraînait une augmentation de la pension moyenne d’année en année à un niveau supérieur à l’inflation.
Or, depuis, la tendance s’est interrompue et la pension des nouveaux retraités se situe en deçà de celle de l’ensemble des retraités.
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Hausse du « sentiment de pauvreté » généralisée
Muriel Pucci, présidente du comité scientifique du CNLE, explique que « le sentiment de pauvreté s’étend à des couches de population bien au-delà de la pauvreté monétaire. Les remontées des acteurs de terrain convergent sur un diagnostic de montée des tensions et de l’agressivité du corps social en lien notamment avec la dématérialisation de l’accès aux droits et l’inadéquation des barèmes des aides aux besoins, y compris pour des personnes en emploi ».
Sont concernés en particulier les personnes seules et les familles monoparentales, les locataires (surtout du parc social), les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), les ouvriers, mais aussi, à partir de 2018, « les agriculteurs, les personnes âgées, les jeunes de 18 à 24 ans et les familles nombreuses ».
L’étude met également en lumière une vision plus pessimiste de leur situation que celle de leurs parents au même âge, ainsi qu’un niveau d’inquiétude pour l’avenir plus important.