Depuis 2015, la SNCF a mis en œuvre un nouveau plan antifraude comprenant une augmentation du montant des contraventions, un meilleur recouvrement, l’installation de portiques sur certains quais ainsi qu’une hausse de la pression exercée sur les agents pour qu’ils se montrent intraitables avec les usagers. S’il est indispensable de sévir à l’encontre des resquilleurs, force est de constater qu’il est de plus en plus difficile pour les voyageurs de bonne foi de faire valoir leur bon droit. D’ailleurs, le nombre de dossiers déposés à la Médiation de la SNCF a bondi en cinq ans. Alors qu’ils étaient moins de 1 500 en 2015, il y en avait près de 5 000 en 2019, avec une hausse de 66 % rien qu’entre 2018 et 2019.
Des gares sans guichet
Plusieurs difficultés se posent pour le consommateur. Tout d’abord, les « points d’arrêt non gérés », à savoir les gares qui ne sont pas équipées de guichets et dans lesquelles il n’est donc pas possible de se procurer un billet. Auparavant, il suffisait au voyageur de se présenter spontanément au contrôleur qui lui faisait payer le « tarif guichet ». Dorénavant, il paiera un tarif dit « exceptionnel », beaucoup plus élevé. Mais dans le pire des cas, le train n’est pas pourvu de contrôleurs à demeure (c’est le cas de nombreux TER), ce qui empêche le voyageur de prendre les devants. Si une brigade antifraude monte à bord de façon inopinée, il sera considéré comme un fraudeur et devra payer une contravention dont le montant varie selon un barème établi en fonction du kilométrage.
Une logique de suspicion de fraude
Pour éviter cet écueil, la SNCF conseille d’utiliser son application (conseil donné à des voyageurs ayant effectué une réclamation relayée à l’UFC-Que Choisir). Or, 16 % des Français n’utilisent pas de smartphone et ceux qui en possèdent un peuvent ne pas maîtriser l’application ou ne pas souhaiter l’utiliser. Sans compter les zones blanches qui ne permettent tout simplement pas d’en faire usage. Suite à de nombreuses polémiques sur ce sujet, la Défenseure des droits, Claire Hédon, a publié en juillet dernier une décision dans laquelle elle estime que cette pratique est « contraire au principe d’égalité des usagers des services publics ». Elle déplore également « le développement d’une logique de suspicion de fraude et l’absence de prise en compte de la bonne foi des voyageurs (…) ».
Des agents très surveillés
En parallèle, les agents de la SNCF sont incités à « faire du chiffre » avec un intéressement perçu en fonction du nombre de contraventions dressées (90 centimes par procès-verbal ainsi qu’une prime annuelle). Daniel Ferté, Secrétaire général adjoint de la fédération FO des cheminots, confie à l’UFC-Que Choisir : « Nous sommes très surveillés (…). Et comme nous ne sommes pas supposés tenir compte de la bonne foi des voyageurs, un contrôleur compréhensif (…) se met en faute professionnelle ».
Des voies de recours infructueuses
Les contrôleurs encouragent les voyageurs lésés à effectuer une réclamation mais les réponses des services contentieux sont rarement satisfaisantes. Quant à l’actuel médiateur de la SNCF nommé en 2019, Jean-Luc Dufournaud, c’est un ancien cadre de la société ferroviaire (tout comme sa prédécesseure Henriette Chaubon), ce qui entre en contradiction avec le principe d’indépendance de la fonction…
La Fnaut Grand Est se saisie du problème
Depuis plusieurs années, la FNAUT Grand Est constate la baisse du service de vente de titres de transport SNCF en guichets. Face à une situation qui semble s’aggraver (diminution du nombre de guichets, horaires d’ouverture restreints, allongement des files d’attente en gare, écrans des guichets vieillissants devenus illisibles…), le Conseil d’Administration de la FNAUT Grand Est a décidé en juin dernier de procéder à un recensement pour appréhender la situation dans la Région Grand Est, notamment en sollicitant ses membres et partenaires. Un premier état des lieux devrait être dressé en septembre afin d’étayer ses demandes auprès de la région Grand Est et de la SNCF, en espérant des avancées dans le bon sens.