La loi EGalim* était jugée insuffisante par les professionnels du secteur. Une nouvelle proposition de loi, dite EGalim 2, vient donc d’être adoptée en première lecture par les députés. Elle vise notamment à améliorer la rémunération des agriculteurs. Mais son article 4 pourrait avoir des effets sur l’étiquetage de l’origine des produits dans les aliments transformés.
Un retour en arrière pour les consommateurs
Le texte complète l’article L. 412-4 du Code de la consommation qui stipule que « l’indication du pays d’origine est obligatoire pour les produits agricoles et alimentaires et les produits de la mer, à l’état brut ou transformé ». Et d’ajouter la mention : « pour lesquels il existe un lien avéré entre certaines de leurs propriétés, notamment en termes de protection de la santé publique et de protection des consommateurs, et leur origine ».
Cette précision a provoqué l’ire des associations de consommateurs pour qui ce texte ouvre une brèche pour les industriels. Comment prouver qu’une viande « origine France » présente de meilleures qualités nutritives qu’une viande polonaise dans un plat de lasagnes par exemple ? Les plats préparés et produits industriels contenant du lait ou de la viande risquent de présenter finalement une mention « origine UE » des plus obscures. Pour Olivier Andrault (UFC-Que Choisir), « c’est un retour en arrière sur la transparence réclamée par les consommateurs ».
Le côté opaque de l’agro-alimentaire
À l’origine de ce remaniement, il y a le géant laitier Lactalis. En 2016, celui-ci a attaqué devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) un décret qui dérogeait à un règlement européen. Le texte obligeait les industriels français à un étiquetage transparent. L’origine du lait et des viandes utilisés dans les denrées transformées devaient y figurer.
Le principal argument de Lactalis était d’éviter un « nationalisme alimentaire ». Cela lui portait préjudice dans l’exportation de ses produits. La mention « origine France » aurait fait chuter ses ventes. « Cette opacité leur permet d’importer du lait, mais aussi et surtout de la poudre de lait ou du beurre concentré, d’autres pays européens », selon Olivier Andrault. Mais un expert anonyme rapporte au journal Le Parisien une tout autre explication… « Dans leurs négociations avec les éleveurs, la menace de pouvoir importer des produits venant de l’étranger leur permet de négocier les prix du lait au plus bas ».
De son côté, le député LREM à l’origine de la proposition de loi, Grégory Besson-Moreau, avoue que « le texte n’est pas d’une très grande avancée ». Il déclare toutefois se conformer aux décisions de la CJUE. La Cour a donné raison à Lactalis et le Conseil d’État a annulé le décret en mars 2021. Le député compte sur la présidence française de l’UE au 1er janvier 2022. Cela fera peut-être évoluer les choses.
*(n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous)